- MITEUX ET MAGNIFIQUES -
Éditions M.E.O., 2014
139 pages
Éditions M.E.O., 2014
139 pages
LES GENS DU CANAL
Au sud de Bruxelles, une déchetterie. Un canal. Une péniche-bistrot. Un décor à la fois cafardeux et magique où évoluent des êtres à son image: miteux et magnifiques, pour reprendre l'oxymore qui patronne le livre d'Évelyne Wilwerth. Un ouvrage qu'elle qualifie de Romanouvelles. Avec raison puisque, au fil des textes et de l'un à l'autre, différents acteurs se croisent, se découvrent, s'ignorent, s'aiment ou se chamaillent. Un microcosme saisissant d'humanité – c'est tout dire –, vivant ses désirs, ses rêves, ses folies ou ses déconvenues sous le regard de sphinx rudes et mélancoliques : ces montagnes de bagnoles éventrées dans la déchetterie. Il y a des gens de passage ou des familiers des lieux comme l'éternel pêcheur, les habitués de la péniche-bistrot, des paumés, des gamines délurées, des amants d'un jour, des joggeurs, des vagabond(e)s, une équipe de tournage... La ronde est au diapason d'une œuvre toujours imprévisible où se mêlent fantaisie folâtre, réalisme poétique et profondeur dans la légèreté.
Mais aussi célébration intense du désir, depuis la sensualité guillerette jusqu'aux jubilations érotiques. Nourries parfois de fantasmes comme celui de ce couple qui soudoie le gardien pour faire l'amour avec frénésie dans les conteneurs d'encombrants. Ces mêmes conteneurs auxquels une vieille femme se voit destinée. Ce n'est pas la seule fascination de cette déchetterie, où un évadé « en récréation » s'offre l'escalade d'une montagne de trams à la casse, qui le fera roi du monde avant d'être ramené en prison. Et là haut sur le pont du canal, c'est une gamine gorgée de désirs qui régale les bateliers des richesses exposées sous sa minijupe. Au gré des rencontres et des sentiments, c'est bien une comédie humaine qui se joue dans ce petit univers peu glorieux, mais enchanté par la complicité d'un regard poétique et fraternel.
(Ghislain Cotton, Le Carnet et les Instants ; février-mars 2014)
Au sud de Bruxelles, une déchetterie. Un canal. Une péniche-bistrot. Un décor à la fois cafardeux et magique où évoluent des êtres à son image: miteux et magnifiques, pour reprendre l'oxymore qui patronne le livre d'Évelyne Wilwerth. Un ouvrage qu'elle qualifie de Romanouvelles. Avec raison puisque, au fil des textes et de l'un à l'autre, différents acteurs se croisent, se découvrent, s'ignorent, s'aiment ou se chamaillent. Un microcosme saisissant d'humanité – c'est tout dire –, vivant ses désirs, ses rêves, ses folies ou ses déconvenues sous le regard de sphinx rudes et mélancoliques : ces montagnes de bagnoles éventrées dans la déchetterie. Il y a des gens de passage ou des familiers des lieux comme l'éternel pêcheur, les habitués de la péniche-bistrot, des paumés, des gamines délurées, des amants d'un jour, des joggeurs, des vagabond(e)s, une équipe de tournage... La ronde est au diapason d'une œuvre toujours imprévisible où se mêlent fantaisie folâtre, réalisme poétique et profondeur dans la légèreté.
Mais aussi célébration intense du désir, depuis la sensualité guillerette jusqu'aux jubilations érotiques. Nourries parfois de fantasmes comme celui de ce couple qui soudoie le gardien pour faire l'amour avec frénésie dans les conteneurs d'encombrants. Ces mêmes conteneurs auxquels une vieille femme se voit destinée. Ce n'est pas la seule fascination de cette déchetterie, où un évadé « en récréation » s'offre l'escalade d'une montagne de trams à la casse, qui le fera roi du monde avant d'être ramené en prison. Et là haut sur le pont du canal, c'est une gamine gorgée de désirs qui régale les bateliers des richesses exposées sous sa minijupe. Au gré des rencontres et des sentiments, c'est bien une comédie humaine qui se joue dans ce petit univers peu glorieux, mais enchanté par la complicité d'un regard poétique et fraternel.
(Ghislain Cotton, Le Carnet et les Instants ; février-mars 2014)
Un roman en nouvelles. Une gerbe d’étincelles… narratives
28 mars 2014 par Phil RW dans Livres
Curieux. Tout à notre feuilleton sur les productions M.E.O., enchaîner Soline de Laveleye et Évelyne Wilwerth !
Passer d’un conte qui ne (se) raconte pas aux vingt-quatre romanouvelles de Miteux et magnifiques, une effervescence.
Curieux. On entre très aisément dans le dernier Wilwerth. Écriture fluide, dynamique. Pas de longues descriptions, pas de digressions.
Non, on plonge illico dans la vie, action et émotion. À l’image de l’auteure, déliée, toute en sourire.
Curieux. Car, à peine a-t-on découvert Bilal, employé dans une déchetterie, confronté journellement au laid, au rebut, à peine a-t-on été capté par sa situation, son histoire, la rencontre (décisive ?) de Bérengère, sa remise en question… À peine…
Quatre pages. On passe déjà à la nouvelle suivante.
Curieux. Car on bascule, d’un coup, de l’aisance à l’inconfort. La première ligne nous avait mis sur les rails d’un voyage, on était accolé à la vitre dès les premières secondes… Arrachement. Marilyn. Ou Marlène. Erzatz du glamourous modèle. En décrochage. Paradoxal. Comme l’autre. On s’accroche à ses décolletés mais elle ne s’accroche plus à rien. Perdition. Deux filles jalouses qui s’approchent. Malintentionnées. Que va-t-il advenir ? Difficulté de la critique ! L’auteure nous propose des textes si courts (le plus long a six pages !) qu’il est délicat d’en évoquer les contours, on effleure déjà la chute :
Vite. Vite. Mais sans déconner. Oh, encore des bagnoles qui se pointent. Foutue chaussée. 23h57. Robin a soudain la tremblote. Pas idéal pour…
Bon, plus aucun phare au loin, plus aucun bruit de moteur. Mais sur le chemin pour piéton ? Il croit apercevoir une ombre. Vite, en finir. Empoigner la chose, la hisser, c’est affreusement lourd, la hisser sur la rambarde, cœur qui cogne et sueur qui dégouline, bras qui ramollissent, quel connard il est, vite, des phares approchent…
Robin pousse la chose dans le canal.
Un plouf à réveiller les morts. Et l’eau furibarde. L’eau noirâtre, qui fait peur. Et lui qui devrait déguerpir.
Non. Pétrifié.
Le lecteur passera par un sas de frustration. Avant de saisir les intentions de l’écrivaine, d’adapter ses attentes et de profiter pleinement du projet.
Leçon de vie. Car on devrait toujours partir d’une page vierge, ne pas avoir besoin de béquilles, être dans la disponibilité, l’éveil, la liberté.
Le projet ? Décapant. Vingt-quatre textes présentés comme… romanouvelles. Un nouveau genre? Car il faut revoir le deuxième flux de sensations, en ouvrir un troisième. On a un projet global, comme dans un roman, un tout cohérent. Le cœur du livre est un paysage très circonscrit dans lesquels passent et repassent des personnages, tantôt à l’avant-plan, tantôt simples figurants d’esquisses narratives.
Le paysage ? Un canal bruxellois. Une zone qui n’a rien de résidentiel. Des allures de no man’s land. Une déchetterie. Avec des empilements surréalistes de voitures, ou de trams. Un pont. Une péniche-bistrot fréquentée par des artistes. Et une plage à proximité. La Plage Plaisir. Un artifice, pour ceux qui n’ont pas droit à la vraie plage. Les personnages ? Certains sont comme des statues ou des phares, ils ne bougent quasi pas, font partie du décor, tel un pêcheur,
LE pêcheur. D’autres auront droit à un tour sur le carrousel du récit, ou à plusieurs. Des individus souvent marginaux ou marginalisés, saisis dans des moments de remise en question, de prise de risque, de dévoilement, proches d’un basculement. Tantôt magnifiques, tantôt miteux, tantôt miteux ET magnifiques.
Le tableau est animé. Au sens étymologique. Anima, l’âme. Car la zone du canal voit s’ébaucher des aventures, des destins. Imaginez un Breughel. Une scène de patinoire. Un décor habilement planté, une foultitude d’acteurs. La caméra s’attarde sur l’un puis sur l’autre, nous raconte des interactions. Un fragment de vie de l’un, on l’abandonne, on le retrouve plus loin, suivant une évolution ou à partir d’une perspective différente. L’auteure se joue de nos attentes mais c’est pour nous offrir, somme toute, la quinte essence de vingt-quatre romans, leurs climax. Mieux même. Respectueuse de notre créativité de lecteur, elle nous mène vers l’acmé puis efface sa trace de dea ex machina, laisse sur des pointillés qu’il nous revient de combler.
Nous avons donc droit à une leçon dans l’art d’écrire, de narrer. Un mélomane songera aux Variations pour clavier/piano d’un Beethoven ou d’un Bach.
Un littéraire se remémorera les esquisses modernistes d’un Thierry Horguelin (un très ludique la Nuit sans fin en 2012,
chez L’Oie de Cravan).
Accaparer, en quelques lignes, quelques pages, l’attention du lecteur, le réveiller, l’obliger à participer. Élaborer des entames de thriller, saupoudrer d’accents policiers ou psychologiques, sociologiques… Instiller du mystère, de la peur, de l’humour, de l’émotion. Sans oublier un érotisme omniprésent.
Évelyne Wilwerth ! Près de quarante ans de carrière ! Des recueils de poésies, de nouvelles, des romans pour adultes ou pour la jeunesse, des contes, du théâtre ou même une biographie traduite en néerlandais et en anglais, un essai. Mais. Une éternelle jeunesse. Un pétillement. Elle qui aime tant la danse… elle danse. Elle virevolte entre ses récits sans jamais laisser s’installer la moindre goutte de superflu, de lourdeur. Légère et grave tout à la fois. Telle un papillon, nous renvoyant soudain l’image d’un monde empesé… qui nous entoure mais n’est pas le sien. Et on imagine sans peine la qualité (et l’ambiance) de ses ateliers d’écriture.
Revue Karoo (en ligne) par Philippe Remy-Wilkin
28 mars 2014 par Phil RW dans Livres
Curieux. Tout à notre feuilleton sur les productions M.E.O., enchaîner Soline de Laveleye et Évelyne Wilwerth !
Passer d’un conte qui ne (se) raconte pas aux vingt-quatre romanouvelles de Miteux et magnifiques, une effervescence.
Curieux. On entre très aisément dans le dernier Wilwerth. Écriture fluide, dynamique. Pas de longues descriptions, pas de digressions.
Non, on plonge illico dans la vie, action et émotion. À l’image de l’auteure, déliée, toute en sourire.
Curieux. Car, à peine a-t-on découvert Bilal, employé dans une déchetterie, confronté journellement au laid, au rebut, à peine a-t-on été capté par sa situation, son histoire, la rencontre (décisive ?) de Bérengère, sa remise en question… À peine…
Quatre pages. On passe déjà à la nouvelle suivante.
Curieux. Car on bascule, d’un coup, de l’aisance à l’inconfort. La première ligne nous avait mis sur les rails d’un voyage, on était accolé à la vitre dès les premières secondes… Arrachement. Marilyn. Ou Marlène. Erzatz du glamourous modèle. En décrochage. Paradoxal. Comme l’autre. On s’accroche à ses décolletés mais elle ne s’accroche plus à rien. Perdition. Deux filles jalouses qui s’approchent. Malintentionnées. Que va-t-il advenir ? Difficulté de la critique ! L’auteure nous propose des textes si courts (le plus long a six pages !) qu’il est délicat d’en évoquer les contours, on effleure déjà la chute :
Vite. Vite. Mais sans déconner. Oh, encore des bagnoles qui se pointent. Foutue chaussée. 23h57. Robin a soudain la tremblote. Pas idéal pour…
Bon, plus aucun phare au loin, plus aucun bruit de moteur. Mais sur le chemin pour piéton ? Il croit apercevoir une ombre. Vite, en finir. Empoigner la chose, la hisser, c’est affreusement lourd, la hisser sur la rambarde, cœur qui cogne et sueur qui dégouline, bras qui ramollissent, quel connard il est, vite, des phares approchent…
Robin pousse la chose dans le canal.
Un plouf à réveiller les morts. Et l’eau furibarde. L’eau noirâtre, qui fait peur. Et lui qui devrait déguerpir.
Non. Pétrifié.
Le lecteur passera par un sas de frustration. Avant de saisir les intentions de l’écrivaine, d’adapter ses attentes et de profiter pleinement du projet.
Leçon de vie. Car on devrait toujours partir d’une page vierge, ne pas avoir besoin de béquilles, être dans la disponibilité, l’éveil, la liberté.
Le projet ? Décapant. Vingt-quatre textes présentés comme… romanouvelles. Un nouveau genre? Car il faut revoir le deuxième flux de sensations, en ouvrir un troisième. On a un projet global, comme dans un roman, un tout cohérent. Le cœur du livre est un paysage très circonscrit dans lesquels passent et repassent des personnages, tantôt à l’avant-plan, tantôt simples figurants d’esquisses narratives.
Le paysage ? Un canal bruxellois. Une zone qui n’a rien de résidentiel. Des allures de no man’s land. Une déchetterie. Avec des empilements surréalistes de voitures, ou de trams. Un pont. Une péniche-bistrot fréquentée par des artistes. Et une plage à proximité. La Plage Plaisir. Un artifice, pour ceux qui n’ont pas droit à la vraie plage. Les personnages ? Certains sont comme des statues ou des phares, ils ne bougent quasi pas, font partie du décor, tel un pêcheur,
LE pêcheur. D’autres auront droit à un tour sur le carrousel du récit, ou à plusieurs. Des individus souvent marginaux ou marginalisés, saisis dans des moments de remise en question, de prise de risque, de dévoilement, proches d’un basculement. Tantôt magnifiques, tantôt miteux, tantôt miteux ET magnifiques.
Le tableau est animé. Au sens étymologique. Anima, l’âme. Car la zone du canal voit s’ébaucher des aventures, des destins. Imaginez un Breughel. Une scène de patinoire. Un décor habilement planté, une foultitude d’acteurs. La caméra s’attarde sur l’un puis sur l’autre, nous raconte des interactions. Un fragment de vie de l’un, on l’abandonne, on le retrouve plus loin, suivant une évolution ou à partir d’une perspective différente. L’auteure se joue de nos attentes mais c’est pour nous offrir, somme toute, la quinte essence de vingt-quatre romans, leurs climax. Mieux même. Respectueuse de notre créativité de lecteur, elle nous mène vers l’acmé puis efface sa trace de dea ex machina, laisse sur des pointillés qu’il nous revient de combler.
Nous avons donc droit à une leçon dans l’art d’écrire, de narrer. Un mélomane songera aux Variations pour clavier/piano d’un Beethoven ou d’un Bach.
Un littéraire se remémorera les esquisses modernistes d’un Thierry Horguelin (un très ludique la Nuit sans fin en 2012,
chez L’Oie de Cravan).
Accaparer, en quelques lignes, quelques pages, l’attention du lecteur, le réveiller, l’obliger à participer. Élaborer des entames de thriller, saupoudrer d’accents policiers ou psychologiques, sociologiques… Instiller du mystère, de la peur, de l’humour, de l’émotion. Sans oublier un érotisme omniprésent.
Évelyne Wilwerth ! Près de quarante ans de carrière ! Des recueils de poésies, de nouvelles, des romans pour adultes ou pour la jeunesse, des contes, du théâtre ou même une biographie traduite en néerlandais et en anglais, un essai. Mais. Une éternelle jeunesse. Un pétillement. Elle qui aime tant la danse… elle danse. Elle virevolte entre ses récits sans jamais laisser s’installer la moindre goutte de superflu, de lourdeur. Légère et grave tout à la fois. Telle un papillon, nous renvoyant soudain l’image d’un monde empesé… qui nous entoure mais n’est pas le sien. Et on imagine sans peine la qualité (et l’ambiance) de ses ateliers d’écriture.
Revue Karoo (en ligne) par Philippe Remy-Wilkin
'Le Soir' 21 juin 2014
Revue d'art et de littérature 'Le Non-Dit' (juillet 2014)
Le printemps en automne
Regardez autour de vous. Le vert tendre et intense, le blanc éclatant et délicat ; le jaune insolent et irradiant, le rose pastel et élégant : le printemps est de retour ! La sève, fluide bien qu’épaisse, gorge les plantes, perle des troncs, revigore les tiges.
Les bourgeons, petits boutons de vie en désordre, s’épanouissent en fleurs. La lumière reprend ses droits : elle se déverse, impériale, par flots de rayons ; elle se diffuse, tamisée, à travers les nuages et les branchages. Les pépiements, gazouillements et autres piaillements joyeux ravissent les oreilles. Les peaux endormies se dégourdissent sous la caresse du soleil ou le frémissement d’une brise fraîche et piquante. Les corps se dévoilent, s’offrent, palpitent. Envol des sens. Tout comme ce samedi 20 septembre, une journée étrangement printanière dans ses effluves et ses effets.
Approchez de l’hôtel un peu vieillot aux murs envahis par le lierre. Pas loin de la mer. À l’intérieur, une petite quinzaine de chambres à la décoration surannée. Le végétal, sur les tapisseries et dans le jardin attenant, prolifère et embaume. Et derrière les dahlias, les pois de senteur, les capucines, l’herbe folle, le tilleul et le marronnier, la silhouette d’un vieux chat fatigué, tigré, à moitié borgne, se découpe et s’éloigne tristement vers le Nord.
Respirez. Humez. Ouvrez l’œil, surtout, car la bâtisse et ses occupants d’un soir titillent le voyeurisme. Eulalie, l’hôte temporaire, et octogénaire, du numéro 10, décrit ainsi les lieux à son ami Théodore : « Dans un hôtel très plaisant, où des robes s’envolent des balcons, et des soutiens, et des culottes, la mienne par exemple, un hôtel où l’on aperçoit parfois, dans l’ombre du jardin, un homme nu à la silhouette égyptienne… » Car chaque porte s’ouvre sur une scène d’intimité – délicatement esquissée par l’auteure Évelyne Wilwerth – puis se referme discrètement sur les secrets des corps en extase.
Découvrez. La Femme qui se libère, ose, rougit, jouit. L’Homme qui se perd, hésite, (se) cherche, jouit. La Femme et l’Homme, corps flétris ou en devenir, en solo ou en duo, amants d’un soir ou d’une vie, in absentia ou in presentia, passifs ou actifs, dans la découverte ou la complicité, qui jouissent. Imprégnez-vous enfin de la cantilène charnelle d’Eulalie aux étoiles :
Ouverture… confiance… audace… fantaisie… folie… intuition… désobéissance… intensité… libération… libération sans fin…
Samia HAMMAMI
Regardez autour de vous. Le vert tendre et intense, le blanc éclatant et délicat ; le jaune insolent et irradiant, le rose pastel et élégant : le printemps est de retour ! La sève, fluide bien qu’épaisse, gorge les plantes, perle des troncs, revigore les tiges.
Les bourgeons, petits boutons de vie en désordre, s’épanouissent en fleurs. La lumière reprend ses droits : elle se déverse, impériale, par flots de rayons ; elle se diffuse, tamisée, à travers les nuages et les branchages. Les pépiements, gazouillements et autres piaillements joyeux ravissent les oreilles. Les peaux endormies se dégourdissent sous la caresse du soleil ou le frémissement d’une brise fraîche et piquante. Les corps se dévoilent, s’offrent, palpitent. Envol des sens. Tout comme ce samedi 20 septembre, une journée étrangement printanière dans ses effluves et ses effets.
Approchez de l’hôtel un peu vieillot aux murs envahis par le lierre. Pas loin de la mer. À l’intérieur, une petite quinzaine de chambres à la décoration surannée. Le végétal, sur les tapisseries et dans le jardin attenant, prolifère et embaume. Et derrière les dahlias, les pois de senteur, les capucines, l’herbe folle, le tilleul et le marronnier, la silhouette d’un vieux chat fatigué, tigré, à moitié borgne, se découpe et s’éloigne tristement vers le Nord.
Respirez. Humez. Ouvrez l’œil, surtout, car la bâtisse et ses occupants d’un soir titillent le voyeurisme. Eulalie, l’hôte temporaire, et octogénaire, du numéro 10, décrit ainsi les lieux à son ami Théodore : « Dans un hôtel très plaisant, où des robes s’envolent des balcons, et des soutiens, et des culottes, la mienne par exemple, un hôtel où l’on aperçoit parfois, dans l’ombre du jardin, un homme nu à la silhouette égyptienne… » Car chaque porte s’ouvre sur une scène d’intimité – délicatement esquissée par l’auteure Évelyne Wilwerth – puis se referme discrètement sur les secrets des corps en extase.
Découvrez. La Femme qui se libère, ose, rougit, jouit. L’Homme qui se perd, hésite, (se) cherche, jouit. La Femme et l’Homme, corps flétris ou en devenir, en solo ou en duo, amants d’un soir ou d’une vie, in absentia ou in presentia, passifs ou actifs, dans la découverte ou la complicité, qui jouissent. Imprégnez-vous enfin de la cantilène charnelle d’Eulalie aux étoiles :
Ouverture… confiance… audace… fantaisie… folie… intuition… désobéissance… intensité… libération… libération sans fin…
Samia HAMMAMI
Revue TRAVERSEES (juillet 2015)
Sous un soleil jaune azuré (cela est-il une couleur, peut-on le dire ?) Evelyne Wilwerth choisit la poésie en prose romanesque pour évoquer l’érotisme. A cela une raison majeure : « la première nous tend les bras » écrit-elle. Le second aussi. Mais comme ses consoeurs Yvonne Caroutch, Vénus Khoury-Ghata, Lucie Spède, l’auteure de « Hôtel de la mer sensuelle » accorde à l’érotisme une part de jeu. Embrasure, embrassement et embrasement vont de pair sur la pointe des soupirs. La femme sitôt vue, l’homme sitôt enveloppé de la chaleur aux mains nues, le trouble infuse l’air avec légèreté aussi étroitement que le volet se colle à sa feuillure.
D’une chambre à l’autre, les mots glissent entre des genoux, veulent la tiédeur mais aussi l’altitude sur l’oblique des membres et sur le drap froissé. La poétesse joue des mèches de la flamme amoureuse sans trop les dénouer. Il arrive même que la parole ouvre la bouche dans le muet jusqu’en la gorge profonde. Caressant à tâtons, la main s’approche pour cadencer le plaisir selon des vagues audacieuses. Si bien que dans l’ « hôtel de la mer sensuelle » les fenêtres sont ouvertes mais la porte fermée. Un murmure rapidement est presque inaudible dans la forge du plaisir. Et la fusion crée des écarts lorsque la poétesse comme ses personnages laisse les Zeus fléchir dans leurs hautes pensées de parvenus. Au Parnasse elle préfère la chambre de la mer.
Sous ses pavés sa place et sa plage dès que l’amant profite de la brèche de « jambes très écartées ». Voici soudain, sortant des chambres, le chant des profondeurs cachées. Les amants pour un temps de jeu seront deux homologues barbares, égaux dans leurs annonciations et leurs ébats. La poésie en prose les exhausse dans les gouffres de la féminité formatrice. La profondeur s’y fait surplomb. Et sur la fraîcheur de l’écart des mots surgissent l’ouverture suprême, la parole emportée étrangère au langage de certitude. Elle fait se conjoindre les êtres pour franchir le seuil d’un plaisir à la fois connu mais jusque-là ignoré. Et si une cloison de peau départage les amants, un même mouvement les enveloppe dans l’attente de mots qui pourraient s’y glisser. C’est là ramener le vocable écrit au mot proféré. Le mot non dans son vouloir d’éternité mais dans le souffle qui le profère et qui se pâme.
©Jean-Paul Gavard-Perret
Sous un soleil jaune azuré (cela est-il une couleur, peut-on le dire ?) Evelyne Wilwerth choisit la poésie en prose romanesque pour évoquer l’érotisme. A cela une raison majeure : « la première nous tend les bras » écrit-elle. Le second aussi. Mais comme ses consoeurs Yvonne Caroutch, Vénus Khoury-Ghata, Lucie Spède, l’auteure de « Hôtel de la mer sensuelle » accorde à l’érotisme une part de jeu. Embrasure, embrassement et embrasement vont de pair sur la pointe des soupirs. La femme sitôt vue, l’homme sitôt enveloppé de la chaleur aux mains nues, le trouble infuse l’air avec légèreté aussi étroitement que le volet se colle à sa feuillure.
D’une chambre à l’autre, les mots glissent entre des genoux, veulent la tiédeur mais aussi l’altitude sur l’oblique des membres et sur le drap froissé. La poétesse joue des mèches de la flamme amoureuse sans trop les dénouer. Il arrive même que la parole ouvre la bouche dans le muet jusqu’en la gorge profonde. Caressant à tâtons, la main s’approche pour cadencer le plaisir selon des vagues audacieuses. Si bien que dans l’ « hôtel de la mer sensuelle » les fenêtres sont ouvertes mais la porte fermée. Un murmure rapidement est presque inaudible dans la forge du plaisir. Et la fusion crée des écarts lorsque la poétesse comme ses personnages laisse les Zeus fléchir dans leurs hautes pensées de parvenus. Au Parnasse elle préfère la chambre de la mer.
Sous ses pavés sa place et sa plage dès que l’amant profite de la brèche de « jambes très écartées ». Voici soudain, sortant des chambres, le chant des profondeurs cachées. Les amants pour un temps de jeu seront deux homologues barbares, égaux dans leurs annonciations et leurs ébats. La poésie en prose les exhausse dans les gouffres de la féminité formatrice. La profondeur s’y fait surplomb. Et sur la fraîcheur de l’écart des mots surgissent l’ouverture suprême, la parole emportée étrangère au langage de certitude. Elle fait se conjoindre les êtres pour franchir le seuil d’un plaisir à la fois connu mais jusque-là ignoré. Et si une cloison de peau départage les amants, un même mouvement les enveloppe dans l’attente de mots qui pourraient s’y glisser. C’est là ramener le vocable écrit au mot proféré. Le mot non dans son vouloir d’éternité mais dans le souffle qui le profère et qui se pâme.
©Jean-Paul Gavard-Perret
L’AVIS DE LECTURES AU COEUR ♥️♥️
Pour Évelyne Wilwerth, écrivain belge, qui publia en 2002 un recueil de nouvelles intitulé Embrasser la vie sur la bouche, il n’y a pas d’âge pour savourer le bonheur d’être vivant et d’aimer. Son dernier roman, Hôtel de la mer sensuelle, nous conduit sur les traces d’une poignée de voyageurs que les hasards de l’existence rassemblent le temps d’une nuit dans un hôtel au charme suranné. Seuls ou en couple, ils sont arrivés avant le coucher du soleil pour occuper les quatorze chambres de cet établissement, dont les tourelles romantiques surplombent un vaste jardin. Dans ce cadre enchanteur, où la nuit ne tarde pas à charrier les parfums suaves de l’été finissant, Adélaïde, Marc-Aurèle, Helmut, Maritza, Eulalie, Augustin et tous ceux qui se sont arrêtés là en même temps qu’eux pour une courte étape se laissent un à un surprendre par le désir. Entre les chambres et le parc, les balcons, comme de mystérieux sas, ouvrent sur l’enivrement des sens. Le feuillage des tilleuls, les pois de senteur, les parterres de capucines, les effluves capiteux d’une végétation noyée de lune alimentent doucement l’émoi. Et tandis que se lèvent de folles tempêtes sensuelles, l’amour naît, se prend au jeu, s’évanouit. Entre fusion sentimentale et bouleversement des sens, Évelyne Wilwerth transporte le lecteur de chambre en chambre, l’électrise, l’amène malgré lui à se faire voyeur, à marcher à son tour dans les pas de ces héroïnes qui chantent l’amour de la vie. Hymne à la sensualité féminine, cette succession de scènes intimes ébauche un art de la volupté d’où la tendresse n’est jamais absente. De l’adolescente à l’octogénaire, le corps des femmes exulte. Et près d’elles, les hommes découvrent les pièges ensorcelants de la douceur. De la mer, qu’on devine à peine, ne subsiste à l’arrière-plan que la promesse du plaisir et de ses délicieux raz de marée. Porté par la simplicité de son style, le texte d’Évelyne Wilwerth oscille entre tentation théâtrale et lyrisme poétique avec une gourmandise qui ne laissera personne indifférent. Roman qui exalte la liberté féminine, Hôtel de la mer sensuelle est un livre qui se lit d’une traite et qu’il faut naturellement découvrir en voyage. Seul ou à deux, mais au plus près de la mer…
O.d’Harnois
Pour Évelyne Wilwerth, écrivain belge, qui publia en 2002 un recueil de nouvelles intitulé Embrasser la vie sur la bouche, il n’y a pas d’âge pour savourer le bonheur d’être vivant et d’aimer. Son dernier roman, Hôtel de la mer sensuelle, nous conduit sur les traces d’une poignée de voyageurs que les hasards de l’existence rassemblent le temps d’une nuit dans un hôtel au charme suranné. Seuls ou en couple, ils sont arrivés avant le coucher du soleil pour occuper les quatorze chambres de cet établissement, dont les tourelles romantiques surplombent un vaste jardin. Dans ce cadre enchanteur, où la nuit ne tarde pas à charrier les parfums suaves de l’été finissant, Adélaïde, Marc-Aurèle, Helmut, Maritza, Eulalie, Augustin et tous ceux qui se sont arrêtés là en même temps qu’eux pour une courte étape se laissent un à un surprendre par le désir. Entre les chambres et le parc, les balcons, comme de mystérieux sas, ouvrent sur l’enivrement des sens. Le feuillage des tilleuls, les pois de senteur, les parterres de capucines, les effluves capiteux d’une végétation noyée de lune alimentent doucement l’émoi. Et tandis que se lèvent de folles tempêtes sensuelles, l’amour naît, se prend au jeu, s’évanouit. Entre fusion sentimentale et bouleversement des sens, Évelyne Wilwerth transporte le lecteur de chambre en chambre, l’électrise, l’amène malgré lui à se faire voyeur, à marcher à son tour dans les pas de ces héroïnes qui chantent l’amour de la vie. Hymne à la sensualité féminine, cette succession de scènes intimes ébauche un art de la volupté d’où la tendresse n’est jamais absente. De l’adolescente à l’octogénaire, le corps des femmes exulte. Et près d’elles, les hommes découvrent les pièges ensorcelants de la douceur. De la mer, qu’on devine à peine, ne subsiste à l’arrière-plan que la promesse du plaisir et de ses délicieux raz de marée. Porté par la simplicité de son style, le texte d’Évelyne Wilwerth oscille entre tentation théâtrale et lyrisme poétique avec une gourmandise qui ne laissera personne indifférent. Roman qui exalte la liberté féminine, Hôtel de la mer sensuelle est un livre qui se lit d’une traite et qu’il faut naturellement découvrir en voyage. Seul ou à deux, mais au plus près de la mer…
O.d’Harnois
Les chambres de l’hôtel
L’Hôtel de la mer sensuelle d’Evelyne Wilwerth se découvre comme on découvrirait une grande maison abandonnée: un peu au hasard, en se laissant guider par son instinct, ou alors méthodiquement, couloir après couloir, chambre après chambre. De toute façon les quatorze pièces de cet hôtel de bord de mer sont numérotées, de sorte que les risques de se perdre ne sont pas bien grands. Et si cela devait arriver, l’auteur a semé çà et là des détails pour l’œil ou pour l’oreille qui rappellent très vite au lecteur où il se trouve. Et de toute façon, on revient trois fois dans chaque chambre, dans chaque histoire, voir et entendre ce qu’apporte la nuit.
C'est ludique, frais, émoustillant, cela fait sourire ou frémir, c'est finement observé, subtilement raconté. On se souvient de soi, on pense à un tel ou une telle, on s’imagine, vieux ou vieille, bref la machine à identification marche à fond, alors que la galerie de personnages est très étendue. Une très jeune fille découvre un émoi nouveau en se frottant à l’accoudoir du fauteuil. Des amants se disputent, d’autres se rabibochent. Ils sont jeunes, ils sont vieux. Ils n’y connaissent pas encore grand-chose, ils savent déjà tout, et pourtant il leur reste tant à découvrir… Ici ils ont peut-être le même sexe, là, sûrement pas. Ici on réinvente les caresses, là on rêve d’un ailleurs. Un bain coule. Un oiseau chante. Des fleurs exhalent leurs parfums. La lune brille. Des yeux étincellent. Des peaux se frôlent. On regarde, on touche, on goûte, on hume. On découvre cahin-caha un rythme, on se donne une cadence effrénée, ou au contraire on réapprend la lenteur. On se caresse, on s’empoigne, on s’emboite, on s’emballe. C’est la fête des corps, et pourtant les cœurs battent aussi, et certaines petites cervelles travaillent beaucoup.
Le chat qui traverse tout cela apporte un contre-chant, innocent Thanatos en marche sur ses coussinets de velours quand tous les autres, ou presque, se pâment dans les bras d'Eros. A chaque page, les corps ne sont que des corps, et en même temps ils sont bien plus que cela, transcendés par la complicité, la connivence, l'espoir, la découverte, la rencontre, le sexe, l'amour.
Qu’est-ce que l’érotisme? La question mérite d’être posée. Pour Evelyne Wilwerth, auteur belge dont on apprécie l’humour, la fougue et la sensibilité, il n’est pas forcément dans l’excès ou le sulfureux. Il lui arrive d’être léger et doux, et de suggérer, derrière un voile ou un silence, sans dire ou montrer crument. En un mot: d’explorer la sensualité. Telle est la réussite de ce court livre ingénieusement construit qui fera passer, de chambre en chambre comme de bras en bras, d’excellentes nuits.
Emmanuèle Sandron
L’Hôtel de la mer sensuelle d’Evelyne Wilwerth se découvre comme on découvrirait une grande maison abandonnée: un peu au hasard, en se laissant guider par son instinct, ou alors méthodiquement, couloir après couloir, chambre après chambre. De toute façon les quatorze pièces de cet hôtel de bord de mer sont numérotées, de sorte que les risques de se perdre ne sont pas bien grands. Et si cela devait arriver, l’auteur a semé çà et là des détails pour l’œil ou pour l’oreille qui rappellent très vite au lecteur où il se trouve. Et de toute façon, on revient trois fois dans chaque chambre, dans chaque histoire, voir et entendre ce qu’apporte la nuit.
C'est ludique, frais, émoustillant, cela fait sourire ou frémir, c'est finement observé, subtilement raconté. On se souvient de soi, on pense à un tel ou une telle, on s’imagine, vieux ou vieille, bref la machine à identification marche à fond, alors que la galerie de personnages est très étendue. Une très jeune fille découvre un émoi nouveau en se frottant à l’accoudoir du fauteuil. Des amants se disputent, d’autres se rabibochent. Ils sont jeunes, ils sont vieux. Ils n’y connaissent pas encore grand-chose, ils savent déjà tout, et pourtant il leur reste tant à découvrir… Ici ils ont peut-être le même sexe, là, sûrement pas. Ici on réinvente les caresses, là on rêve d’un ailleurs. Un bain coule. Un oiseau chante. Des fleurs exhalent leurs parfums. La lune brille. Des yeux étincellent. Des peaux se frôlent. On regarde, on touche, on goûte, on hume. On découvre cahin-caha un rythme, on se donne une cadence effrénée, ou au contraire on réapprend la lenteur. On se caresse, on s’empoigne, on s’emboite, on s’emballe. C’est la fête des corps, et pourtant les cœurs battent aussi, et certaines petites cervelles travaillent beaucoup.
Le chat qui traverse tout cela apporte un contre-chant, innocent Thanatos en marche sur ses coussinets de velours quand tous les autres, ou presque, se pâment dans les bras d'Eros. A chaque page, les corps ne sont que des corps, et en même temps ils sont bien plus que cela, transcendés par la complicité, la connivence, l'espoir, la découverte, la rencontre, le sexe, l'amour.
Qu’est-ce que l’érotisme? La question mérite d’être posée. Pour Evelyne Wilwerth, auteur belge dont on apprécie l’humour, la fougue et la sensibilité, il n’est pas forcément dans l’excès ou le sulfureux. Il lui arrive d’être léger et doux, et de suggérer, derrière un voile ou un silence, sans dire ou montrer crument. En un mot: d’explorer la sensualité. Telle est la réussite de ce court livre ingénieusement construit qui fera passer, de chambre en chambre comme de bras en bras, d’excellentes nuits.
Emmanuèle Sandron
Évelyne Wilwerth,
Hôtel de la mer sensuelle
Les anciens se souviendront peut-être d’un livre paru au début du XXe siècle, signé Henri Barbusse, intitulé « L’Enfer ». Un homme habite une chambre d’hôtel. Par hasard, il découvre une faille dans la cloison qui lui permet d’observer ce qui se passe dans la pièce voisine. Il raconte les misères et les joies qu’il découvre en voyeur invisible. Et parmi ses observations sur ses voisins, pas mal de notations érotiques.
Le roman d’Évelyne Wilwerth est basé sur un principe similaire. Sauf qu’ici c’est une auteure qui invente les situations qu’elle décrit et que les chambres sont chaque fois différentes, visitées plusieurs fois. Les personnages qui défilent ont tous un lien fort avec les plaisirs charnels.
Sven sera mené à vaincre la nostalgie d’un amour passé. Marceline et Maxence jouent à des jeux érotiques et à apprendre la lenteur. Estrella et Helmut sont circassiens, c’est supposer combien ils affectionnent les acrobaties. La jeune Adélaïde éructe sa mauvaise humeur d’être là avec ses parents et découvre sa sensualité. Prosper et Mariette, eux, très vieux couple, retrouvent leur désir en retrouvant leur chambre d’avant. Une préfète trop longtemps célibataire tente de s’encanailler en une rencontre d’inconnu. Pénélope et Bassam expérimentent chacun leur tour les rôles de dominant-dominé tandis qu’une paire d’artistes s’adonnent à la sculpture sur leurs anatomies de modèles vivants.
La collectionneuse d’amants de quatre-vingts printemps est toujours bien vivace. Quant à Marc-Aurèle et Rafaelle, ils savent que parfois on redevient sauvage. Rien à voir avec le séducteur vieillissant qui a décidé de dire à sa compagne que c’est fini, à jamais. Alors que deux émigrés, plusieurs fois parents, perçoivent pour un moment en vacances de tout le poids de leur existence. N’oublions pas ce duo homo en quête d’identité, ni cette paire affublée de pseudonymes qui complètent la panoplie par le sado-maso.
On le voit, ce roman-là c’est aussi une collection de nouvelles, chacune dispersée en plusieurs épisodes à travers le livre. Il est possible de les lire par fragments en tournant normalement les pages ; mais rassembler les morceaux en sautant d’un épisode au suivant s’avère amusant.
Contrairement à Barbusse qui insistait sur la difficulté à vivre, sur les mesquineries humaines, sur la noirceur du vide de beaucoup d’individus, Wilwerth chante le plaisir d’être au monde. Son écriture brasse nos cinq sens en permanence derrière des tonalités syntaxiques et lexicales en corrélation avec les personnages. Sa vision du monde est d’abord un hymne à l’énergie vitale. Même si, en filigrane, la présence du chat des hôteliers rappelle qu’il est impossible d’oublier qu’il y a la mort, tout au bout.
Michel Voiturier
Hôtel de la mer sensuelle
Les anciens se souviendront peut-être d’un livre paru au début du XXe siècle, signé Henri Barbusse, intitulé « L’Enfer ». Un homme habite une chambre d’hôtel. Par hasard, il découvre une faille dans la cloison qui lui permet d’observer ce qui se passe dans la pièce voisine. Il raconte les misères et les joies qu’il découvre en voyeur invisible. Et parmi ses observations sur ses voisins, pas mal de notations érotiques.
Le roman d’Évelyne Wilwerth est basé sur un principe similaire. Sauf qu’ici c’est une auteure qui invente les situations qu’elle décrit et que les chambres sont chaque fois différentes, visitées plusieurs fois. Les personnages qui défilent ont tous un lien fort avec les plaisirs charnels.
Sven sera mené à vaincre la nostalgie d’un amour passé. Marceline et Maxence jouent à des jeux érotiques et à apprendre la lenteur. Estrella et Helmut sont circassiens, c’est supposer combien ils affectionnent les acrobaties. La jeune Adélaïde éructe sa mauvaise humeur d’être là avec ses parents et découvre sa sensualité. Prosper et Mariette, eux, très vieux couple, retrouvent leur désir en retrouvant leur chambre d’avant. Une préfète trop longtemps célibataire tente de s’encanailler en une rencontre d’inconnu. Pénélope et Bassam expérimentent chacun leur tour les rôles de dominant-dominé tandis qu’une paire d’artistes s’adonnent à la sculpture sur leurs anatomies de modèles vivants.
La collectionneuse d’amants de quatre-vingts printemps est toujours bien vivace. Quant à Marc-Aurèle et Rafaelle, ils savent que parfois on redevient sauvage. Rien à voir avec le séducteur vieillissant qui a décidé de dire à sa compagne que c’est fini, à jamais. Alors que deux émigrés, plusieurs fois parents, perçoivent pour un moment en vacances de tout le poids de leur existence. N’oublions pas ce duo homo en quête d’identité, ni cette paire affublée de pseudonymes qui complètent la panoplie par le sado-maso.
On le voit, ce roman-là c’est aussi une collection de nouvelles, chacune dispersée en plusieurs épisodes à travers le livre. Il est possible de les lire par fragments en tournant normalement les pages ; mais rassembler les morceaux en sautant d’un épisode au suivant s’avère amusant.
Contrairement à Barbusse qui insistait sur la difficulté à vivre, sur les mesquineries humaines, sur la noirceur du vide de beaucoup d’individus, Wilwerth chante le plaisir d’être au monde. Son écriture brasse nos cinq sens en permanence derrière des tonalités syntaxiques et lexicales en corrélation avec les personnages. Sa vision du monde est d’abord un hymne à l’énergie vitale. Même si, en filigrane, la présence du chat des hôteliers rappelle qu’il est impossible d’oublier qu’il y a la mort, tout au bout.
Michel Voiturier
'Hôtel de la mer sensuelle' d’Évelyne Wilwerth
Ecoutez Évelyne Wilwerth au micro d’Edmond Morrel
http://www.espace-livres.be/Hotel-de-la-mer-sensuelle-d?rtr=y
L'émission 'ACTU-tv' de ce dimanche 24 mai 2015 à 20h00
Evelyne Wilwerth est l'invitée du site 'Arts et Lettres'
https://www.youtube.com/watch?v=B74fLz4qSqI
Ecoutez Évelyne Wilwerth au micro d’Edmond Morrel
http://www.espace-livres.be/Hotel-de-la-mer-sensuelle-d?rtr=y
L'émission 'ACTU-tv' de ce dimanche 24 mai 2015 à 20h00
Evelyne Wilwerth est l'invitée du site 'Arts et Lettres'
https://www.youtube.com/watch?v=B74fLz4qSqI
Évelyne Wilwerth remet la sensualité des femmes à l'honneur
La thématique de la sensualité est aussi liée à l'affirmation de la liberté féminine. Aujourd'hui, elle est mise à l'honneur par une écrivaine belge, Évelyne Wilwerth. Son dernier roman Hôtel de la mer sensuelle aux Éditions Avant-Propos qui se trouve dans les librairies de Belgique, de France et du Canada francophone, aura droit à une lecture originale à Avignon cet été.
Une mise à l'honneur bien justifiée.
La sensualité des femmes, liberté d'écrivaines?
Par un hasard qui prouve que les coïncidences sont programmées par un sort à la fois taquin et futé, Évelyne Wilwerth avait rencontré dans les rues de Paris la célèbre écrivaine française Régine Deforges. Cette dernière-faut-il le rappeler?- a été l'auteure de nombreux écrits dont La bicyclette bleue aux Editions Fayard en 1987, fameux roman qui a été adapté avec un succès retentissant au cinéma; elle a également été éditrice, présidente de la Société des gens de lettres et membre remarquée du jury du prix Fémina. "Je lui ai dit merci", s'est confiée Évelyne Wilwerth.
"Par ce simple mot, j'ai voulu lui rendre hommage pour avoir défendu la littérature féminine et la sensualité des femmes."
Aujourd'hui, l'écrivaine belge semble relayer cette même défense en tant qu'écrivaine, en tant que femme.
La sensualité féminine à l'Hôtel de la mer sensuelle d'Évelyne Wilwerth
Au creux de son roman Hôtel de la mer sensuelle, Évelyne Wilwerth pousse le lecteur à ouvrir la porte de quatorze chambres d'un hôtel aux allures de castel. À trois reprises, elle l'autorise à entrevoir ce qui s'y passe dans ces pièces où des êtres se retrouvent ou se découvrent. S'il désire en savoir plus sur Sven, Marceline, Pénélope ou Bassam, Maximilien ou les autres, il devra patienter quelques pages pour être autorisé à suivre la célébration du désir, de la sensualité, de l'amour. Car l'auteure a consciemment refermé chaque pièce pendant un certain nombre de pages afin de laisser l'imagination des curieux s'envoler.
Si cet hôtel célèbre l'ivresse de la passion, l'enivrement des sens, il recèle également un trésor de tendresse. Il explique clairement que le transport amoureux n'a pas d'âge et qu'il ne doit pas être occulté par les images inexactes que l'on véhicule aujourd'hui sur notamment ceux que l'on appelle complaisamment-et à tort-les seniors.
"Embrasser la vie sur la bouche"
Évelyne Wilwerth ne cesse d'expliquer dans ses écrits que rien ne s'arrête et que l'âge n'est pas une barrière. D'ailleurs, elle n'aime pas les chaînes. Vive, joyeuse, elle entraîne toujours ses lecteurs dans une farandole où la pétulance est souvent de mise.
Avec son essai 22 astuces pour une vie plus magique (Éditions Maelström, 2011), elle les invite à s'échapper de toutes les désillusions pour affirmer que la vie peut être fabuleuse.
Car elle adore l'existence, Évelyne Wilwerth! Elle aime embrasser la vie sur la bouche (titre de l'un de ses recueils de nouvelles aux Éditions Luce Wilquin, 2001) ou encore affirmer avec malice que les canards en plastique ne meurent jamais (roman pour la jeunesse aux Éditions Averbode, 2005). Elle aime sans compter comme en témoigne son calcul farfelu, mais peut-être exact -selon de nouveaux critères, évidemment- que 16 - 1 = 14 (titre d'un autre de ses romans pour adolescents aux Éditions Mijade, 2005).
Lectures à Bruxelles, à Liège et aussi à Avignon cet été
Aujourd'hui, avec Hôtel de la mer sensuelle, Évelyne Wilwerth nous invite à nous embarquer sur un bateau qui navigue sur une mer sensuelle pleine de surprises, parsemée de troubles épicuriens. Car l'écrivaine est avide de désarçonner ses lecteurs.
Et aussi ses auditeurs!
En effet, pour fêter la parution de son nouvel ouvrage, dans une chambre d'hôtel à Bruxelles et puis à Liège,
avec l'acteur Jean Fürst, elle a lu à ses invités des extraits de son livre. Un vrai spectacle! La saveur des lignes a non seulement conquis son public, mais aussi des professionnels du théâtre: elle lira avec son complice comédien des passages de son Hôtel de la mer sensuelle au théâtre Le Verbe fou à Avignon le 12 juillet 2015.
Ce n'est pas son premier coup d'essai au théâtre. Sa pièce "Souriez, vous vieillissez!" (Éditions Memory Press, 2007) a eu
tellement de succès notamment à Avignon où elle a été jouée en 2009 qu'elle a été traduite en plusieurs langues.
Un rappel de l'importance de la féminité
Évelyne Wilwerth, grande dame de la littérature belge contemporaine, avec son Hôtel de la mer sensuelle, remet donc à l'honneur une thématique riche et essentielle qui parle en filigrane d'affirmation de la féminité dans sa plus sensuelle expression et, donc, de liberté au féminin.
Anna Gold
09-06-2015
M... Belgique (novembre-décembre 2015)
Vendredi 26 février 2016 10h40
LA NACELLE TURQUOISE d'ÉVELYNE WILWERTH (paru chez M.E.O.)
Histoires physiques
Évelyne Wilwerth pratique une écriture véloce qui colle aux émotions de ses personnages. Et plus encore aux sensations qu’ils éprouvent. Car c’est d’une écriture très sensuelle dont il s’agit, qui fait la part belle aux couleurs et aux parfums, notamment.
Tout cela concourt à nous faire à la fois voir et vivement ressentir ce qui nous est raconté.
Wilwerth adopte ici un dispositif narratif singulier (comme d’ailleurs pour Hôtel de la mer sensuelle paru précédemment) pour conter les trois histoires de ce recueil qui racontent chacune une rencontre entre deux êtres qui se connaissent ou non mais auront à se voir pour se parler.
Ils concourent l’un vers l’autre et, pour nous faire ressentir physiquement la rencontre, en bonne observatrice de la chose sensible, l’auteure décrit les trajectoires conjointes, indications d’heures à l’appui, des personnages jusqu’au point d’impact puis, à la façon d'un choc de billes de billard, ce qui résulte de la collision. Les rapprochements et les éloignements, heure après heure, minute par minute, car ne il faut manquer aucun instant : pour comprendre l’enjeu de ce qui se joue, tout compte.
Elle le fait par une succession de paragraphes qui épousent le point de vue de chacun des deux personnages et, sous un angle de vue surplombant, un commentaire marqué par des caractères en italiques.
Puis il y a les histoires. Celles de la rencontre entre un homme et une femme dont on apprendra quel lien les relie. D’une ado fugueuse et d’un SDF. Enfin, la rencontre de deux voisines qui, par la force des choses, auraient dû se rencontrer plus tôt et ne le feront qu’à la veille du départ de l’une d’elles.
Et toujours, cerise sur le gâteau de la rencontre providentielle, une sorte d’ascension, de mise en bulle, de petit éveil ou nirvana qui fait se (re)poser les protagonistes avant de repartir...
« ( …) je ressens une poussée légère, on va peu à peu monter vers le ciel, j’ai l’impression de me délester, de lâcher plein de saletés, ou de mesquineries, notre nacelle est la plus lumineuse, déjà le feuillage des arbres, c’est tout mon être qui est soulevé, enfin soulevé vers l’immensité, comment on appelle ça, une ascendance ? Une transcendance ? »
Ces êtres que les circonstances de la vie mettent en relation ont un vif besoin de parler, de délier par la parole des nœuds de leur existence, de justement se délester... Ce point de jonction était primordial à leur survie. Au point de rencontre de deux êtres, il y a toujours un centre de paroles, une base relationnelle de (re)lancement dans l’existence, semble nous dire Wilwerth.
Dans son histoire de la littérature récente, Olivier Cadiot écrit : Le plus difficile, c’est de superposer l’histoire à la géographie.
On peut dire sans se tromper que, par le contenu et la forme de sa matière verbale, Evelyne Wilwerth réussit ici à merveille ce défi.
Éric Allard
Canal Blog - Blog Littérature et Poésie (19-02-2016)
Trois nouvelles s’imbriquent. Trois duos nous prennent aux tripes.
Yanaël, Angelika : rendez-vous sous haute tension ! Mais quel est donc leur lien ?
Phil, Fred : elle en cavale, lui marginal. Plongée dans leurs lourds secrets et dans des squats inquiétants.
Églantine, Bérengère : deux voisines que tout oppose. Qui est la plus ténébreuse ?
Ces trois apprivoisements déboucheront sur une lueur, puis une lumière. Celle de « la nacelle turquoise », sorte de transcendance.
Des histoires intenses qui ricochent sur nos vies, chassent nos peurs, rallument notre désir d’ouverture, de déploiement.
De tissage humain, tellement nécessaire.
Un panaché de gravité, humour, dureté, tendresse..
Dans ce livre, Evelyne nous propose trois nouvelles.
Trois nouvelles totalement différentes et qui pourtant ont un point commun (mis à part l'auteure), c'est qu'elles vous procurent chacune un tas d'émotions.
Pour la première, il s'agit d'un lien entre nos deux personnages, mais qui ne se devine pas dès le départ, l'auteure a réussi à nous dévoiler beaucoup de choses avant la révélation qui par moment pourrait se deviner et que pourtant je n'ai pas découvert avant de le lire. Ils ont eu chacun des parcours tourmentés et nous apprenons à les connaître au fur et à mesure que les pages se tournent. Des parcours qui font que ce lien n'est pas forcément une chose évidente à gérer.
Pour la deuxième, je dirais que nous sommes dans deux univers que tout oppose et qui pourtant pourraient être liés de par les secrets que l'on garde au fond de soi mais qui peuvent parfois surgir sans que l'on s'y attende.
Pour la troisième, eh bien là je ne vous dévoilerai rien, je vous laisse plutôt faire la découverte par vous-même.
Un univers émotionnellement fort, voila ce que nous offre Evelyne avec ces trois nouvelles qui font chacune une cinquantaine de pages.
Alouqua
Trois nouvelles s’imbriquent. Trois duos nous prennent aux tripes.
Yanaël, Angelika : rendez-vous sous haute tension ! Mais quel est donc leur lien ?
Phil, Fred : elle en cavale, lui marginal. Plongée dans leurs lourds secrets et dans des squats inquiétants.
Églantine, Bérengère : deux voisines que tout oppose. Qui est la plus ténébreuse ?
Ces trois apprivoisements déboucheront sur une lueur, puis une lumière. Celle de « la nacelle turquoise », sorte de transcendance.
Des histoires intenses qui ricochent sur nos vies, chassent nos peurs, rallument notre désir d’ouverture, de déploiement.
De tissage humain, tellement nécessaire.
Un panaché de gravité, humour, dureté, tendresse..
Dans ce livre, Evelyne nous propose trois nouvelles.
Trois nouvelles totalement différentes et qui pourtant ont un point commun (mis à part l'auteure), c'est qu'elles vous procurent chacune un tas d'émotions.
Pour la première, il s'agit d'un lien entre nos deux personnages, mais qui ne se devine pas dès le départ, l'auteure a réussi à nous dévoiler beaucoup de choses avant la révélation qui par moment pourrait se deviner et que pourtant je n'ai pas découvert avant de le lire. Ils ont eu chacun des parcours tourmentés et nous apprenons à les connaître au fur et à mesure que les pages se tournent. Des parcours qui font que ce lien n'est pas forcément une chose évidente à gérer.
Pour la deuxième, je dirais que nous sommes dans deux univers que tout oppose et qui pourtant pourraient être liés de par les secrets que l'on garde au fond de soi mais qui peuvent parfois surgir sans que l'on s'y attende.
Pour la troisième, eh bien là je ne vous dévoilerai rien, je vous laisse plutôt faire la découverte par vous-même.
Un univers émotionnellement fort, voila ce que nous offre Evelyne avec ces trois nouvelles qui font chacune une cinquantaine de pages.
Alouqua
“Je t'y retrouve… sans jamais t'avoir perdue!
Je veux dire que tu as donné ici le meilleur de toi-même!
Un livre palpitant (qui fait battre le coeur plus vite…), trempé d'humanité vraie, lacéré de lames effilées…
Une pièce en trois actes, aux dialogues étourdissants, vifs comme autant d'orages, une phrase entre glace et braise…
Tu déboules dans la vie des gens comme un pirate ou une fée! Une intrigue monstrueuse et tendre entre ciel et terre, des
rebondissements continuels, des crimes affichés comme des caresses (ou l'inverse).
Tes personnages sont autant de funambules, d'imprévisibles routards, des anges déchus! Ils nous bousculent et culpabilisent notre voyeurisme de lecteur!
Et surtout, des poussées libertaires hurlées bien plus qu'écrites !
J'entre dans ton humanité sans réserves, mon amie, tellement heureux de te voir rehausser encore et encore le niveau d'une écriture au couteau !”
Michel Joiret
Je veux dire que tu as donné ici le meilleur de toi-même!
Un livre palpitant (qui fait battre le coeur plus vite…), trempé d'humanité vraie, lacéré de lames effilées…
Une pièce en trois actes, aux dialogues étourdissants, vifs comme autant d'orages, une phrase entre glace et braise…
Tu déboules dans la vie des gens comme un pirate ou une fée! Une intrigue monstrueuse et tendre entre ciel et terre, des
rebondissements continuels, des crimes affichés comme des caresses (ou l'inverse).
Tes personnages sont autant de funambules, d'imprévisibles routards, des anges déchus! Ils nous bousculent et culpabilisent notre voyeurisme de lecteur!
Et surtout, des poussées libertaires hurlées bien plus qu'écrites !
J'entre dans ton humanité sans réserves, mon amie, tellement heureux de te voir rehausser encore et encore le niveau d'une écriture au couteau !”
Michel Joiret
Vendredi 1er octobre. 17 heures 43. Une vieille camionnette s’ébranle sur l’étroit chemin qui longe le fleuve, à P.
Une femme ne la quitte pas des yeux, au balcon de sa coquette maison 1900. Elle s’appelle Bérengère.
Une autre femme s’est postée dans la loggia de la demeure voisine, elle allume une cigarette en suivant des yeux le véhicule sombre, elle respire trop vite, ouvre soudain la fenêtre et jette sa cigarette dans le parterre du jardinet. Elle s’appelle Églantine. [p. 103]
LES TROIS NOUVELLES D’ÉVELYNE WILWERTH mettent en scène une rencontre entre deux personnes, ainsi que l’annoncent d’emblée les titres : Yanaël, Angelika ; Phil, Fred ; Églantine, Bérengère. Ces personnages sont tous torturés, rongés par un secret, que la rencontre éphémère les amènera à révéler pour, enfin, se libérer et entrevoir une lumière au bout du tunnel. Pour les personnages comme pour le lecteur, le cadre est posé dès le début : une réunion de quelques jours, d’une cinquantaine de pages, puis tous se sépareront, reprendront leur chemin.
Ce cadre est rythmé précisément par Évelyne Wilwerth avec les jours et les heures, quelques mots sur la situation des personnages, qui viennent entrecouper leurs points de vue respectifs. Les narrations à la troisième et à la première personne du singulier sont ainsi alternées, dans un style assez oral, direct, au fil des pensées. Le lecteur accompagne véritablement ces narrateurs, se sent proche d’eux et développe de l’empathie à leur égard.
Si les situations de ces rencontres peuvent sembler banales au premier abord, Évelyne Wilwerth sait en jouer et déjouer les attentes du lecteur, en particulier dans la première nouvelle : elle y crée de « mini-chutes » au sein de la nouvelle, laissant le lecteur deviner la situation, puis le détrompe abruptement. Les pensées sont souvent livrées de façon brute, comme autant d’indices et de pièces d’un puzzle à reconstituer. Le suspense des révélations progressives est bien ménagé, à la fois respectueux de la psychologie des personnages – pour qui il n’est pas facile de dire ou d’entendre de telles choses – et tatillon pour le lecteur.
Je vais rentrer chez moi ce soir. Et, quoi qu’il arrive, construire la nacelle de ma vie. [p. 100]
Des nouvelles de l’ombre à la lumière, vers l’espoir.
'Mon Salon Littéraire'. Publié par Mina Merteuil le 13.4.16
Une femme ne la quitte pas des yeux, au balcon de sa coquette maison 1900. Elle s’appelle Bérengère.
Une autre femme s’est postée dans la loggia de la demeure voisine, elle allume une cigarette en suivant des yeux le véhicule sombre, elle respire trop vite, ouvre soudain la fenêtre et jette sa cigarette dans le parterre du jardinet. Elle s’appelle Églantine. [p. 103]
LES TROIS NOUVELLES D’ÉVELYNE WILWERTH mettent en scène une rencontre entre deux personnes, ainsi que l’annoncent d’emblée les titres : Yanaël, Angelika ; Phil, Fred ; Églantine, Bérengère. Ces personnages sont tous torturés, rongés par un secret, que la rencontre éphémère les amènera à révéler pour, enfin, se libérer et entrevoir une lumière au bout du tunnel. Pour les personnages comme pour le lecteur, le cadre est posé dès le début : une réunion de quelques jours, d’une cinquantaine de pages, puis tous se sépareront, reprendront leur chemin.
Ce cadre est rythmé précisément par Évelyne Wilwerth avec les jours et les heures, quelques mots sur la situation des personnages, qui viennent entrecouper leurs points de vue respectifs. Les narrations à la troisième et à la première personne du singulier sont ainsi alternées, dans un style assez oral, direct, au fil des pensées. Le lecteur accompagne véritablement ces narrateurs, se sent proche d’eux et développe de l’empathie à leur égard.
Si les situations de ces rencontres peuvent sembler banales au premier abord, Évelyne Wilwerth sait en jouer et déjouer les attentes du lecteur, en particulier dans la première nouvelle : elle y crée de « mini-chutes » au sein de la nouvelle, laissant le lecteur deviner la situation, puis le détrompe abruptement. Les pensées sont souvent livrées de façon brute, comme autant d’indices et de pièces d’un puzzle à reconstituer. Le suspense des révélations progressives est bien ménagé, à la fois respectueux de la psychologie des personnages – pour qui il n’est pas facile de dire ou d’entendre de telles choses – et tatillon pour le lecteur.
Je vais rentrer chez moi ce soir. Et, quoi qu’il arrive, construire la nacelle de ma vie. [p. 100]
Des nouvelles de l’ombre à la lumière, vers l’espoir.
'Mon Salon Littéraire'. Publié par Mina Merteuil le 13.4.16
Trois nouvelles composent le recueil. Six personnages l’habitent.
Six personnages en quête de hauteur, de transcendance, de renaissance. Yanaël, Angelika, Phil, Fred, Eglantine et Bérangère.
Les prénoms ne sont pas choisis au hasard, ils ont chacun un accent particulier, un genre qui fait qu’ils vont finir par s’associer et se reconnaître. Se trouver bien plus que des affinités, une corde dure et forte que l’on tire violemment de son côté pour gagner la partie, la gagner à deux et faire pencher le destin, être avec quelqu’un, dans le même camp, ensemble enfin. Conçu en une succession de monologues croisés avec didascalies comme au théâtre car ici on se parle tout le temps, par jets vifs, inquiets, entrecoupés de silences, de questions qui ont du mal à être posées, le recueil de nouvelles d’Evelyne Wilwerth cherche le nœud, le moment où les cœurs vont lâcher et se libérer, loin de la routine, du refoulement, du vide. Mais l’ouverture est brève et éphémère, l’épicentre est mouvant comme tout ce qui vit et change, le noyau à atteindre est peut-être un éclair invisible dans le ciel, une nacelle verte qui hésite entre les arbres et les oiseaux de passage, entre le nid et le voyage… Taillant de petites phrases comme des planches de bouleau en y perçant des trous de suspension où se faufilent les mots de manque et de désir, l’auteur nous tient en haleine jusqu’au bout des ces histoires volantes et vagabondes. Il faudrait les lire à voix haute en jouant tous les rôles pour mieux sentir peut-être que notre voix chancelle ou prend de l’assurance selon les jours, les heures, les ombres des gens qui passent sous nos fenêtres et à qui l’on aimerait faire signe… Tout bouge, tout coule, comme le fleuve du philosophe Héraclite qui traverse la vie et le paysage d’Eglantine et de Bérangère. Tout tourne aussi comme cette Grande Roue des villes en fête où sont montés Phil et Fred. Et si elle s’arrêtait, ne fût-ce qu’un instant, pour nous permettre de faire le point et de nous exercer à vivre les choses d’un peu plus haut, en pleine lumière ?...
Michel Ducobu
(Areaw)
Six personnages en quête de hauteur, de transcendance, de renaissance. Yanaël, Angelika, Phil, Fred, Eglantine et Bérangère.
Les prénoms ne sont pas choisis au hasard, ils ont chacun un accent particulier, un genre qui fait qu’ils vont finir par s’associer et se reconnaître. Se trouver bien plus que des affinités, une corde dure et forte que l’on tire violemment de son côté pour gagner la partie, la gagner à deux et faire pencher le destin, être avec quelqu’un, dans le même camp, ensemble enfin. Conçu en une succession de monologues croisés avec didascalies comme au théâtre car ici on se parle tout le temps, par jets vifs, inquiets, entrecoupés de silences, de questions qui ont du mal à être posées, le recueil de nouvelles d’Evelyne Wilwerth cherche le nœud, le moment où les cœurs vont lâcher et se libérer, loin de la routine, du refoulement, du vide. Mais l’ouverture est brève et éphémère, l’épicentre est mouvant comme tout ce qui vit et change, le noyau à atteindre est peut-être un éclair invisible dans le ciel, une nacelle verte qui hésite entre les arbres et les oiseaux de passage, entre le nid et le voyage… Taillant de petites phrases comme des planches de bouleau en y perçant des trous de suspension où se faufilent les mots de manque et de désir, l’auteur nous tient en haleine jusqu’au bout des ces histoires volantes et vagabondes. Il faudrait les lire à voix haute en jouant tous les rôles pour mieux sentir peut-être que notre voix chancelle ou prend de l’assurance selon les jours, les heures, les ombres des gens qui passent sous nos fenêtres et à qui l’on aimerait faire signe… Tout bouge, tout coule, comme le fleuve du philosophe Héraclite qui traverse la vie et le paysage d’Eglantine et de Bérangère. Tout tourne aussi comme cette Grande Roue des villes en fête où sont montés Phil et Fred. Et si elle s’arrêtait, ne fût-ce qu’un instant, pour nous permettre de faire le point et de nous exercer à vivre les choses d’un peu plus haut, en pleine lumière ?...
Michel Ducobu
(Areaw)
Le tourbillon de la vie
Une place en demi-cercle un 21 juin dans une capitale européenne entre 14 heures 20 et 19 heures 09. Le décor est bien planté et le cirque, le cycle de la vie va pouvoir opérer le temps d’une après-midi caniculaire.
Une dizaine de personnages, y compris un animal et une plante, vont subir les affres de l’extrême chaleur. Un couple adultérin présent sous le prétexte d’un colloque, une châtelaine et son père, un enfant et sa mère, une artiste peintre hantée par Nicolas de Staël et ses bleus, un réceptionniste en surpoids, un SDF et son chien, une plante esseulée et assoiffée…
Evelyne Wilwerth relate les séquences de manière chronologique sous divers angles, de façon à balayer le pourtour de l’espace. L’action évolue au fil des différents points de vue et ce qui apparaît d’abord de façon éclatée s’organise en l’histoire d’un lieu à tel moment, comme notamment dans un de ses précédents livres, Hôtel de la mer sensuelle, et un peu à la façon de ces travaux perecquiens circonscrivant toutes les péripéties survenant en un endroit donné (Tentative d’épuisement d’un lieu parisien, La vie mode d’emploi).
Pour ce faire, l'écrivaine malmène la syntaxe, la ponctuation, utilisant tantôt des phrases brèves, faites de quelques mots, tantôt des phrases longues épousant le mouvement, la course du temps ou la courbe d’un instant. Elle use d'un langage performatif pour faire ressentir le tourbillon de la vie.
« Vous tournez, vous me contournez, je tourne, je tourne sur moi-même, la fièvre monte déjà, je répète Vous Vous, l’enroulement est rapide très rapide puis soudainement lent très lent étiré long infiniment long il devient un immense vertige les murs dansent déjà les parfums m’enivrent et soudain Vous serrez fort si fort trop fort vos yeux sont des braises je lâche un cri je vais défaillir Vous me soutenez Vous me redressez violemment la tête de la fureur de votre regard je gémis et soudain c’est le déroulement sauvage et moi je »
Tous les personnages de cette comédie urbaine sont comme enfermés (souvent à deux) dans leur histoire, et le ciel plombé, l’atmosphère étouffante, la catastrophe annoncée sont à l’image de leur situation à ce tournant de leur existence.
L’autre du couple fermé est plus ou moins présent, plus ou moins passé, il ne permet plus l’évasion, pris lui-même dans la relation maladive, le cercle vicieux qui s’est établi et qui court à sa perte. Il faudra un drame, peut-être un meurtre, en tout cas une victime expiatoire, une remise à plat des choses et des chronos à l'instant zéro pour que les protagonistes du récit, en réalisant le manque d’amour dont ils souffraient de même que le lien rompu avec la terre, le centre vital de leur être, repartent de plus belle dans la ronde des jours...
Une fois encore, Evelyne Wilwerth donne un livre éclatant qui a du style, de l’allant et une morale aussi que vive que bouleversante.
Éric Allard
(01-02-2017)
LES BELLES PHRASES
BLOG-NOTES LITTÉRAIRE d'ÉRIC ALLARD
Plusieurs personnages prêtent leur voix à ce long texte entrecoupé de saynètes brèves. On retrouve Apolline (une artiste), Lausanne et Canberra (deux amants), Nadim (un enfant), le ventru Athanasse et Frisée, un être étrange, ainsi qu’un personnage
anonyme (appelé « on ») et qui s’attarde sur chaque individu réuni sur une gigantesque place, en attendant que quelque chose se
passe. Éclate? A mesure que le récit se met en place, le lecteur devine que l’un des protagonistes est visé par un danger, mais
lequel ? L’intérêt du livre tient évidemment dans la tension qui monte, même si la beauté de l’écriture est le premier argument de vente de cet ouvrage. Il suffit de lire la prose d’Évelyne Wilwerth pour se laisser bercer par l’agencement des phrases, la fluidité des dialogues et l’idée de travailler chaque personnage de l’intérieur.
Il y a aussi une grande poésie qui sourd de ses propos, avec des réflexions intimes et une vision profondément humaniste.
Georgie Bartholomé
Bruxelles-Culture
15-02-2017
anonyme (appelé « on ») et qui s’attarde sur chaque individu réuni sur une gigantesque place, en attendant que quelque chose se
passe. Éclate? A mesure que le récit se met en place, le lecteur devine que l’un des protagonistes est visé par un danger, mais
lequel ? L’intérêt du livre tient évidemment dans la tension qui monte, même si la beauté de l’écriture est le premier argument de vente de cet ouvrage. Il suffit de lire la prose d’Évelyne Wilwerth pour se laisser bercer par l’agencement des phrases, la fluidité des dialogues et l’idée de travailler chaque personnage de l’intérieur.
Il y a aussi une grande poésie qui sourd de ses propos, avec des réflexions intimes et une vision profondément humaniste.
Georgie Bartholomé
Bruxelles-Culture
15-02-2017
Un livre au découpage déroutant au départ, mais dès que nous sommes lancés, plus rien ne nous arrête, les pages tournent et on arrive à la fin sans s’en rendre compte.
L’auteure nous livre tout un tas d’émotions en plusieurs histoires qui s’entremêlent et qu’au final, je trouve très complémentaires l’une de l’autre.
L’auteure a une plume qui sonne très juste dans le reflet de la société, j’ai eu l’occasion de la découvrir précédemment dans
« La nacelle turquoise », et encore une fois je suis charmée par cette manière d’écrire qui peut être par moments assez poétique, et par d’autres assez piquante. Un mélange qui nous donne un résultat très prenant et riche en émotions.
Un regard sur notre société, reflet des qualités et défauts qu’elle renferme.
Un livre à lire sans hésiter si vous aimez être surpris et emporté dans les émotions.
Brigitte Alouqua
GoodReads
04-02-2017
L’auteure nous livre tout un tas d’émotions en plusieurs histoires qui s’entremêlent et qu’au final, je trouve très complémentaires l’une de l’autre.
L’auteure a une plume qui sonne très juste dans le reflet de la société, j’ai eu l’occasion de la découvrir précédemment dans
« La nacelle turquoise », et encore une fois je suis charmée par cette manière d’écrire qui peut être par moments assez poétique, et par d’autres assez piquante. Un mélange qui nous donne un résultat très prenant et riche en émotions.
Un regard sur notre société, reflet des qualités et défauts qu’elle renferme.
Un livre à lire sans hésiter si vous aimez être surpris et emporté dans les émotions.
Brigitte Alouqua
GoodReads
04-02-2017
Ce nouvel opus d’Évelyne Wilwerth se déroule lors d’une après-midi caniculaire sur une place en demi-cercle d’une capitale européenne. Il se présente sous la forme de 45 tableaux proposant tour à tour le point de vue de différents personnages transitant sur ladite place. Certains se connaissent, s’observent, tissant les fils d’un réseau qui prend presque forme humaine, tellement on sent battre ses pulsations.
On découvre alors sans transition l’univers d’Apolline, cette artiste peintre en deuil et en mal d’inspiration ; Canberra et Lausanne en plein vertige sensuel ; Nadim qui, du haut de ses 6 ans, veut s’ouvrir aux changements ; Athanase, le vieux Grec en plein questionnement existentiel ; la Frisée, qui tient toujours un objet noir en main ; Dame Dentelle, une fleur assoiffée sur son balcon ; enfin, Corbillard, le chien d’un SDF, fidèle à son maître, alors qu’il n’a que des miettes de nourriture et de tendresse.
"[C]ette fidélité […] reçu plus aucun gramme d’amour ou au moins de respect depuis plus d’un an c’est moi l’idiot l’idiot qui a peut-être peur de changer de vie peur de quitter peur de le quitter […]
Les mots gentils. Quatre maximum.
Les injures. Des centaines.
Les coups de pied. Des centaines.
Donc.
En plus, je crève de faim.
En plus, je suis libre."
La tension sur la place est palpable et va crescendo, on sent la « fièvre d’une société qui tourne sur elle-même ». À travers un style concis, parfois presque télégraphique et dénué de ponctuation, Évelyne Wilwerth nous insuffle le sentiment d’urgence qui anime les personnes et suggère l’éclatement imminent.
"Et je rejette brutalement les draps, je pousse un cri, Lausanne ! la joie est inouïe, nos peaux se retrouvent, et nos rires, et nos folies, le lit tangue déjà, nous partons pour le tout grand voyage, nous renouons avec la fièvre, la grande célébration des corps nos corps l’exacerbation le désir trop fort qui fait mal je suis toi toi Lausanne toi Canberra six mois c’est trop beaucoup trop oh nos peaux et la fusion déjà, elle sera longue brûlante parfaite […] c’est le grand vertige."
N’oublions jamais les caresses est qualifié de roman, mais il pourrait tout aussi bien être considéré comme une pièce de théâtre dans le répertoire absurde. On y retrouve en effet des didascalies au début de chaque tableau et des monologues ou dialogues mettant en lumière le cirque humain cher à Ionesco.
L’auteure se distingue cependant de ce dernier par son style empreint de sensorialité et ses métaphores qui apportent une touche de poésie à une réalité parfois dure. La réalité présentée est vibrante, comme un cri prêt à surgir.
"Longtemps qu’on n’a plus offert une caresse.
Longtemps qu’on n’a plus caressé.
Une fourrure.
Un animal.
Une peau humaine.
Sous laquelle vibre une âme ailée."
Séverine Radoux
ActuaLitté
21-02-2017
On découvre alors sans transition l’univers d’Apolline, cette artiste peintre en deuil et en mal d’inspiration ; Canberra et Lausanne en plein vertige sensuel ; Nadim qui, du haut de ses 6 ans, veut s’ouvrir aux changements ; Athanase, le vieux Grec en plein questionnement existentiel ; la Frisée, qui tient toujours un objet noir en main ; Dame Dentelle, une fleur assoiffée sur son balcon ; enfin, Corbillard, le chien d’un SDF, fidèle à son maître, alors qu’il n’a que des miettes de nourriture et de tendresse.
"[C]ette fidélité […] reçu plus aucun gramme d’amour ou au moins de respect depuis plus d’un an c’est moi l’idiot l’idiot qui a peut-être peur de changer de vie peur de quitter peur de le quitter […]
Les mots gentils. Quatre maximum.
Les injures. Des centaines.
Les coups de pied. Des centaines.
Donc.
En plus, je crève de faim.
En plus, je suis libre."
La tension sur la place est palpable et va crescendo, on sent la « fièvre d’une société qui tourne sur elle-même ». À travers un style concis, parfois presque télégraphique et dénué de ponctuation, Évelyne Wilwerth nous insuffle le sentiment d’urgence qui anime les personnes et suggère l’éclatement imminent.
"Et je rejette brutalement les draps, je pousse un cri, Lausanne ! la joie est inouïe, nos peaux se retrouvent, et nos rires, et nos folies, le lit tangue déjà, nous partons pour le tout grand voyage, nous renouons avec la fièvre, la grande célébration des corps nos corps l’exacerbation le désir trop fort qui fait mal je suis toi toi Lausanne toi Canberra six mois c’est trop beaucoup trop oh nos peaux et la fusion déjà, elle sera longue brûlante parfaite […] c’est le grand vertige."
N’oublions jamais les caresses est qualifié de roman, mais il pourrait tout aussi bien être considéré comme une pièce de théâtre dans le répertoire absurde. On y retrouve en effet des didascalies au début de chaque tableau et des monologues ou dialogues mettant en lumière le cirque humain cher à Ionesco.
L’auteure se distingue cependant de ce dernier par son style empreint de sensorialité et ses métaphores qui apportent une touche de poésie à une réalité parfois dure. La réalité présentée est vibrante, comme un cri prêt à surgir.
"Longtemps qu’on n’a plus offert une caresse.
Longtemps qu’on n’a plus caressé.
Une fourrure.
Un animal.
Une peau humaine.
Sous laquelle vibre une âme ailée."
Séverine Radoux
ActuaLitté
21-02-2017